Conférence de presse de M. Jean-Yves Le Drian et M. Heiko Maas

Alliance pour le Multilatéralisme
Conférence de presse conjointe de
M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l’Europe et des Affaires étrangères de la France
et M. Heiko Maas, ministre des Affaires étrangères de l’Allemagne
2 avril 2019
= Propos de M. Jean-Yves Le Drian =

Bonjour Mesdames et Messieurs,

Heiko Maas et moi-même avons souhaité profiter du « jumelage » de nos présidences du Conseil de sécurité pour porter ensemble un message de soutien aux Nations Unies et à l’action multilatérale. C’est dans cet esprit que Heiko Maas et moi-même venons de tenir, à la Représentation permanente de l’Allemagne, une réunion de présentation de l’initiative « Alliance pour le multilatéralisme ».

Face au risque de déconstruction de notre édifice multilatéral, la France et l’Allemagne ont la conviction d’avoir un message à porter ensemble. Parce que nous sommes les mieux placées pour rappeler au monde ce que peuvent être les conséquences du repli sur soi, de l’unilatéralisme, de la libération de la parole extrémiste, du choc des nationalismes.

Depuis plusieurs mois, nous avons eu avec Heiko Maas, et avec plusieurs de nos homologues, des discussions régulières sur les défis auxquels la coopération internationale est aujourd’hui confrontée

Nous partageons un constat. Depuis plusieurs années, la remise en question dont les institutions multilatérales font l’objet a changé de nature. Ce ne sont plus seulement les institutions qui sont critiquées, pour leurs lourdeurs bureaucratiques, pour leur manque d’efficience, mais ce n’est plus le fonctionnement des Nations Unies qui est critiqué – c’est la pertinence même de ces outils multilatéraux. Ce sont les principes mêmes qui sont au fondement de la coopération entre les Etats qui sont désormais battus en brèche.

A Munich, en février dernier, nous nous étions réunis avec les Ministres canadien et japonais pour évoquer les moyens de préserver notre acquis multilatéral, d’une manière qui à la fois soit constructive et inclusive, et qui n’exclue aucun partenaire, mais qui permette à tous ceux qui souhaitent coopérer davantage, à ceux que j’appelle les « puissances de bonne volonté », de marquer leur soutien à l’édifice multilatéral et de disposer d’un lieu d’échanges et de proposition.

C’est l’esprit de l’« Alliance pour le multilatéralisme » – dont l’idée originale revient à Heiko Maas, et j’en profite pour lui rendre hommage pour son sens de la formule. C’est en fait un engagement renouvelé en faveur du multilatéralisme et des Nations Unies –un engagement qui est ouvert à tous, et qui à terme doit profiter à tous.

Nous avons profité de notre temps de présence à New York pour présenter cette initiative à un nombre restreint de partenaires, dont nous savons qu’ils partagent notre préoccupation, mais aussi notre volonté d’aller de l’avant.

Notre objectif est double :

D’une part, montrer que les Etats qui soutiennent le multilatéralisme et sont attachés aux Nations Unies restent majoritaires. C’est une majorité qui a été longtemps silencieuse, parce que nous avons longtemps considéré la coopération internationale comme allant de soi. Or, ce n’est pas le cas aujourd’hui, et les Etats attachés au multilatéralisme doivent se faire connaître, et unir leurs forces et leurs voix.

L’autre objectif est de créer un réseau souple et agile d’Etats, prêts à soutenir des initiatives de coopération internationale renforcée, à former des coalitions de soutiens, à générer du consensus, dans un esprit constructif et ouvert.

La réunion d’aujourd’hui nous a permis d’échanger avec nos partenaires sur les sujets d’’urgence internationale nécessitant un investissement accru. Beaucoup d’entre eux d’ailleurs regroupent les priorités que nous avons identifiées pour la présidence du G7 : lutte contre les inégalités mondiales, conséquences du développement des nouvelles technologies, urgence climatique et environnementale. Tous ces thèmes feront l’objet de notre part d’initiatives dans le cadre d’un multilatéralisme renouvelé.
La coopération n’est jamais le choix de la facilité. Mais c’est le choix de la sécurité – car il n’y a de sécurité que collective – et c’est la meilleure garantie de paix durable. C’est l’engagement que nous souhaitons renouveler, auprès de nos partenaires « de bonne volonté ».

Pour reprendre une expression que Heiko et moi-même avons récemment utilisée dans une tribune commune « qui, sinon nous » pour tenir ce discours, ambitieux et constructif ?

Donc nous poursuivrons donc cette initiative dans les prochains mois, avec pour objectif de réunir l’Alliance au niveau des Ministres et de présenter les premières initiatives dans le cadre de la 74e Assemblée générale des Nations Unies au mois de septembre, et d’ici là nous allons développer notre initiative et convaincre autour de nous.

[H.MAAS]

***

Q : Thank you very much Ministers for doing this press conference. My name is Michelle Nichols I am the Reuters UN bureau chief. I have two questions for you. First of all you will have seen what is being happening in Britain : Prime Minister Theresa May said she is going to ask for a further extension to Brexit beyond April 12 so that she can work it out. I’d be grateful for your response to that and what do you think they should be given a further delay ?
Also on the G7, Secretary of State Pompeo is not attending, do you think that undermines the G7, have you tried to speak to him to convince him to attend ? Any reaction to that ? Thank you.

MINISTRE : Sur le G7, oui Mike Pompeo ne sera pas là, c’est son adjoint Monsieur Sullivan qui sera présent. Je le regrette mais ça n’empêchera pas le G7 de travailler puisque l’ensemble des pays sera représenté à un haut niveau de responsabilité. Comme je vais pour ma part rencontrer Mike Pompeo après demain à Washington j’aurais aussi l’occasion d’évoquer la préparation du G7 avec lui. Nous le reverrons d’ailleurs ensemble au cours du Conseil ministériel de l’OTAN.

Sur le Brexit je serais tenté dire heure par heure il y a du nouveau. Si nous devions réagir en permanence sur toutes les innovations législatives britanniques on passerait nos journées sur le sujet. Donc, je crois que le calendrier a été fixé par les chefs d’Etats et de gouvernement, donc s’il y a du nouveau c’est auprès des chefs d’Etats et de gouvernement qu’il faut que Madame Theresa May fasse connaitre ses orientations. Ça se passe le 10 et donc c’est à ce moment-là qu’il y aura normalement une décision définitive. Mais honnêtement, c’est parfois difficile à suivre, y compris les votes d’hier soir. Mais je constate qu’hier soir, sur quatre votes différents il n’y a eu aucune majorité sur aucun des votes, qu’l y a déjà eu trois votes sur l’accord de retrait et qu’il n’y a pas eu de majorité ni sur l’accord de retrait ni non plus sur le non accord sur le Brexit dur. Il importante que les Britanniques, trois ans après leurs décisions, puissent afficher une ligne claire sinon ce sera malheureusement le Brexit dur qui se mettra en œuvre dès les jours prochains prochain.

[H.MAAS]

[Question en allemand sur les exportations d’armement]

[H.MAAS]

MINISTRE : Sur la question des armes, le Traité d’Aix-la-Chapelle prévoit que la France et l’Allemagne élaboreront une approche commune sur les exportations d’armement, qui doit se décliner dans un accord juridiquement contraignant. Nous avons cet engagement en commun et évidemment nous en parlons pour aboutir à un texte qui nous engage de part et d’autres. Je sais par ailleurs qu’il y a un débat en Allemagne, que je respecte, y compris sur les exportations d’armement en direction de l’Arabie Saoudite, y compris sur l’extension de l’embargo. Moi, je n’ai pas à me prononcer sur ce sujet que je considère comme un problème de politique intérieure allemande. Ce que je veux dire néanmoins sur tout ça, c’est que nous avons des histoires et des cultures différentes concernant ce sujet, mais que la question de l’armement ne doit pas uniquement se réfléchir sur l’immédiateté mais doit se réfléchir à l’aune d’une dimension plus vaste qui est la construction progressive d’une défense européenne. Et c’est sur cette orientation là que nous échangeons très régulièrement et je dois dire très sereinement.

Sur l’effort de l’Allemagne concernant sa défense, là aussi il s’agit d’un sujet de choix budgétaire de l’Allemagne et je m’abstiendrai de faire des commentaires. Simplement je constate que dans un certain nombre de décisions communes, fortes, y compris en ce qui concerne le Traité d’Aix-la-Chapelle, le fait que nous soyons solidaires dans notre défense et dans notre sécurité est un thème de plus en plus fort pour la qualité de nos relations. Et comme j’ai été dans une vie antérieure Ministre de la Défense, je peux constater l’ampleur de l’évolution de la relation dans ce domaine entre l’Allemagne et la France. Il faut que progressivement nous puissions acquérir une conception commune de la souveraineté stratégique de nos deux pays.

Q : Carole Lander de l’Agence France Presse. Ma question porte sur le Golan. Vous savez que la Ligue Arabe ce weekend à demander un projet de résolution au Conseil de sécurité pour dénoncer la décision américaine de reconnaitre l’annexion par Israël du Golan. Est-ce que la France et l’Allemagne seraient prêtes à appuyer une telle action ? Est-ce qu’il n’y a pas une hésitation à défendre la souveraineté de la Syrie, alors que durant la guerre le droit international a été bafoué, plus qu’une fois en Syrie ?

MINISTRE : Sur le Golan, nous nous sommes expliqués sur le fonds pour marquer notre désaccord par rapport à la décision prise par le Président Trump qui, de notre point de vue, est contraire au droit international. Sur la démarche de la Ligue arabe, nous ne sommes pas saisis de document et de texte, donc permettez-moi d’attendre d’avoir un texte. Mais sur le fond, vous connaissez notre position et ce n’est pas la première fois que je le dis.

[H.MAAS]

Q : Seana Magee from Kyodo News. Given the challenges we heard today in the debate on the NPT review conference, what do you view as a successful outcome ? And in the past there has been not outcome reached, how do you see that going into next year ? Thank you.

[H.MAAS]

Q : Edie Lederer from Associated Press. On your initiative on multilateralism, could you tell us whether you have approached the US administration and what the reaction has been from President Trump’s administration or whether you do plan to approach them, and try and get them to be part of this initiative ? Thank you.

MINISTRE : C’est une initiative qui vise à revitaliser le multilatéralisme. Elle se veut inclusive, elle veut faire en sorte que les fondamentaux du multilatéralisme restent les normes à partir desquelles les différents Etats membres des Nations unies saisissent les défis et les enjeux de la période. Qui veut venir nous rejoindre nous rejoint. Elle n’est organisée contre personne, sauf pour le développement du multilatéralisme.

[H.MAAS]

Dernière modification : 25/02/2020

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