Colombie : "Les élections approchent et avec elles le risque que les tensions s’accroissent" [en]
COLOMBIE
INTERVENTION DE MME NATHALIE BROADHURST,
REPRÉSENTANTE PERMANENTE ADJOINTE DE LA FRANCE AUPRÈS DES NATIONS UNIES
AU CONSEIL DE SECURITE
New York, le 20 janvier 2022
Merci Madame la Présidente,
Je remercie le représentant spécial du Secrétaire général Carlos Ruiz Massieu pour sa présentation. Je voudrais également saluer le témoignage poignant de Mme. Luz Marina Giraldo et la présence parmi nous de M. Emilio Archila, conseiller du Président pour la stabilisation et la consolidation.
Madame la Présidente, nous avons célébré il y a quelques semaines le cinquième anniversaire de l’Accord de paix. Cet Accord est un acquis historique et la Colombie un exemple pour la communauté internationale. Après un demi-siècle de conflit meurtrier, l’ancienne guérilla a déposé les armes et s’est transformée en parti politique, et aujourd’hui 13 000 anciens combattants s’efforcent de construire la paix au quotidien. La Juridiction spéciale pour la paix et la Commission pour la vérité ouvrent la voie à la réconciliation d’une société entière et en plaçant les victimes au cœur du processus.
Madame la Présidente,
Le cinquième anniversaire est l’occasion de tirer un bilan lucide de la mise en œuvre de l’Accord, de souligner les avancées mais aussi les défis qui persistent. Permettez-moi de revenir sur quelques aspects :
Premièrement, les élections approchent et avec elles le risque que les tensions s’accroissent. Il importe donc que les autorités mettent tout en œuvre pour qu’elles se tiennent de manière sûre et inclusive. Cela implique notamment de garantir la sécurité des lieux de vote et des candidats, et en particulier dans les 16 circonscriptions électorales pour la paix.
Deuxièmement, la clôture par le procureur de la Cour Pénale internationale de l’examen préliminaire sur la Colombie, qui avait été ouvert en 2004, est très encourageante. Elle engage la Colombie à poursuivre elle-même les enquêtes. Nous saluons les progrès constants à cet égard du système global pour la vérité, la justice, les réparations et la non-répétition, en particulier s’agissant des affaires 01 et 03. Nous encourageons toutes les parties à s’engager dans le processus d’établissement de la vérité.
Troisièmement, la poursuite des violences en Colombie constitue l’obstacle principal à la paix. Plusieurs centaines d’ex-combattants, de défenseurs des droits humains et des dirigeants sociaux ont été assassinés depuis 2016, comme cela a été rappelé. Chacun de ces assassinats fragilise la mise en œuvre de l’Accord. Il importe donc de renforcer la présence de l’Etat dans les zones reculées, de renforcer les institutions qui peuvent enquêter et de poursuivre les criminels. Nous appelons les autorités à réunir plus fréquemment la Commission nationale des garanties de sécurité et à mettre en œuvre la politique de démantèlement des groupes armés.
Quatrièmement, pour gagner la paix, il faut bien sûr offrir des opportunités socio-économiques viables et justes pour tous. Il y a eu des avancées et nous les saluons. Davantage pourrait être fait s’agissant de la réforme rurale et de l’accès à la terre et au logement. Il importe d’y consacrer des budgets importants et adaptés. Les chapitres de l’accord qui touchent à l’inclusivité et au sort des femmes sont à cet égard essentiels et doivent être mis en œuvre. De manière générale, les institutions qui sont prévues au titre de l’Accord sont bâties pour favoriser le dialogue et doivent se réunir davantage.
Madame la Présidente,
L’Accord de paix s’enracine peu à peu, et nous souhaitons qu’il devienne irréversible. C’est pourquoi sa mise en œuvre intégrale nous semble la meilleure des garanties.
Soyez assurés que la France, ainsi que l’Union Européenne, continuera d’apporter tout son soutien à tous ceux qui, en Colombie, sur le terrain, sont au quotidien mobilisés en faveur de la paix.
Je vous remercie./.