Développer le partenariat entre l’ONU et l’UA, vecteur de consolidation du multilatéralisme [en]
Faire taire les armes en Afrique : coopération entre les Nations unies et les organisations régionales
Intervention de M. François Delattre, représentant permanent de la France auprès des Nations unies
Débat ouvert du Conseil de sécurité - 27 février 2019
Monsieur le Président,
Je souhaite d’abord saluer la présence du Ministre des Affaires étrangères et de la coopération de Guinée Équatoriale ainsi que celle du Secrétaire d’Etat allemand aux Affaires étrangères.
Monsieur le Président,
Permettez-moi, au nom de la France, de vous remercier pour l’organisation de ce débat important et de saluer l’excellent travail accompli par la Guinée Équatoriale pendant sa présidence du Conseil de sécurité tout au long du mois de février, sous la direction unanimement appréciée de votre Ambassadeur à l’ONU.
Je souhaiterais également saluer l’adoption à l’unanimité de la résolution 2457, portée par la Guinée Équatoriale au nom du A3 et de l’Union africaine et que nous avons co-parrainée.
Je remercie également chaleureusement Mme DiCarlo, M. Lamamra et M. Gounden pour leurs interventions particulièrement éclairantes.
Monsieur le Président,
1/ Pour la France, le partenariat entre l’ONU et l’Union africaine revêt aujourd’hui une importance stratégique pour la prévention et la résolution des crises en Afrique.
Le développement de ce partenariat constitue par ailleurs à nos yeux l’un des vecteurs privilégiés de la consolidation et de la refondation du multilatéralisme que nous appelons de nos vœux. C’est dire combien soutenir et renforcer ce partenariat entre l’ONU et l’Union africaine fait partie des priorités de tout premier plan de la France.
Or la dynamique de ce partenariat est aussi forte que prometteuse. L’année qui vient de s’écouler témoigne en effet des résultats importants qui ont été engrangés grâce notamment aux initiatives conjointes des Nations unies et de l’Union africaine, initiatives impulsées par la collaboration exemplaire entre le Secrétaire général des Nations unies et le Président de la Commission de l’Union africaine, M. Moussa Faki.
Sans être exhaustif, je pense notamment à la signature récente de l’accord de paix en RCA, à la transition pacifique du pouvoir en République démocratique du Congo, à la signature de l’accord de paix au Soudan du Sud en septembre dernier ou encore à la dynamique de rapprochement historique en cours dans la Corne de l’Afrique depuis la fin du mois de juin dernier.
Ces avancées positives ne doivent naturellement pas masquer le fait que des situations de crises et de conflits demeurent sur le continent. Dans ce contexte, si le partenariat entre l’ONU et l’Union africaine revêt une importance stratégique pour la France, c’est également en raison de la montée en puissance des opérations africaines de paix. Dans la ligne de ce qui a été dit précédemment, notamment par Monsieur Lamamra et par le Ministre des Affaires étrangères de la Guinée Équatoriale, nous soutenons donc pleinement l’initiative portée par l’Union africaine en faveur du financement durable et prévisible des opérations africaines de paix, y compris sur contributions obligatoires des Nations unies. Le Président Emmanuel Macron a rappelé l’engagement résolu de la France sur ce sujet lors de la dernière Assemblée générale des Nations unies et les opérations africaines de paix font également partie, vous le savez, des priorités de la présidence française en cours du G7.
Monsieur le Président,
2/ Les opérations africaines de paix et la réponse militaire aux crises qui frappent le continent ne sont bien sûr qu’une partie de la solution. En écho à ce qui a été dit par plusieurs orateurs, et notamment par le Secrétaire d’Etat allemand il y a quelques minutes, nous sommes convaincus qu’une approche plus large, en amont comme en aval des crises, est indispensable. C’est tout l’objectif de l’Initiative « Faire taire les armes en Afrique d’ici 2020 » portée par l’Union africaine et ses Etats membres et que nous soutenons pleinement. C’est là encore un champ où le partenariat entre l’ONU, l’Union africaine et les organisations sous-régionales africaines revêt une importance majeure à nos yeux.
En matière de prévention, des résultats concrets ont été obtenus récemment. Je pense notamment à la Gambie où les efforts combinés des Nations unies, de l’Union africaine et de la CEDEAO ont permis d’empêcher que la crise post-électorale ne se transforme en un conflit dont les populations auraient été les principales victimes. Je pense plus récemment au succès de votre action, Monsieur le Haut représentant, cher Monsieur Lamamra, en coopération avec la SADC, les Nations unies mais aussi l’Union européenne pour prévenir une crise majeure autour de l’organisation des élections présidentielles à Madagascar.
Je pense enfin à l’ensemble des instruments dont l’Union africaine s’est dotée au cours de ces dernières années, notamment le mécanisme africain d’évaluation par les pairs, le Groupe des Sages et le Réseau panafricain des femmes médiatrices de l’Union africaine (FemWise-Africa). Sur ce dernier point, je souhaiterais une nouvelle fois rappeler ici que le rôle des femmes dans la prévention et la résolution des conflits ainsi que leur participation aux processus politiques sont des facteurs absolument cruciaux pour aboutir à une paix durable. C’est assurément l’un des combats de la France.
Monsieur le Président,
3/ Plus largement encore, toutes les actions entreprises par l’Union africaine et ses Etats membres pour traiter les causes profondes des conflits constituent aujourd’hui un élément clef pour la prévention des crises sur le long terme et pour éviter qu’elles ne se répètent.
Dans ce cadre, nous saluons les efforts entrepris par l’Union africaine, ses Etats membres et les organisations sous-régionales africaines pour mettre en œuvre l’Agenda 2030 pour le développement durable et l’Agenda 2063 de l’Union africaine, lancer la zone économique de libre échange continentale, développer l’architecture de gouvernance de l’Union africaine, promouvoir le respect des droits de l’Homme, investir dans l’éducation des jeunes générations et mettre en œuvre l’Accord de Paris pour lutter contre le changement climatique, qui est une menace extrêmement grave, nous le savons tous, pour le continent. La France soutient sans réserve l’ensemble de ces priorités.
N’oublions pas enfin toute l’importance de la mobilisation et de la lutte contre les trafics illicites d’armes sur le continent africain. Ces trafics continuent en effet d’alimenter les conflits et d’exacerber la violence armée, tout en nourrissant la criminalité organisée et le terrorisme. Nous saluons à cet égard les efforts en faveur de l’universalisation et de la pleine application de tous les instruments applicables, qui doivent être des priorités.
Monsieur le Président,
Je souhaiterais conclure en citant Léopold Sedar Senghor, qui affirmait qu’il ne pouvait y avoir de paix armée, de paix sous l’oppression, et de fraternité sans égalité. Ces paroles doivent tous nous guider pour appuyer résolument nos partenaires et amis africains dans leur objectif de mettre fin aux crises sur le continent. Soyez assurés de l’engagement déterminé de la France en ce sens.
Je vous remercie.