Syrie : le mécanisme d’aide humanitaire transfrontalière doit être maintenu [en]

Syrie humanitaire
Intervention de Mme Anne Gueguen, représentante permanente adjointe de la France auprès des Nations unies
Conseil de sécurité – 19 décembre 2019

Madame la Présidente,

Tout d’abord un très grand merci à Madame Ursulla Mueller pour sa présentation. Je salue la présence du vice-ministre des Affaires étrangères du Koweït et je m’associe pleinement aux félicitations exprimées par l’ambassadeur Heusgen pour la contribution remarquable du Koweït au travail du Conseil de sécurité.
Je ne reviendrai pas sur les chiffres mentionnés par la Sous-Secrétaire générale, ils parlent d’eux-mêmes : l’aide humanitaire transfrontalière est indispensable et irremplaçable. Le renouvellement du mécanisme d’aide humanitaire transfrontalière est un impératif.

Tant les agences humanitaires, que le Secrétariat des Nations unies, à commencer par le Secrétaire général lui-même, que les pays de la région, insistent sur la nécessité de préserver ce mécanisme. Permettez-moi de rappeler brièvement pourquoi.

Tout d’abord, l’aide transfrontalière reste aujourd’hui indispensable pour venir en aide à plus de quatre millions de personnes dans le besoin, parce que le régime de Bachar al-Assad continue d’obstruer l’accès humanitaire et d’utiliser l’aide à des fins politiques alors que la situation reste instable dans l’ensemble du pays, y compris dans les zones reprises par le régime. Il n’y a donc pas d’alternative.

Deuxièmement, la population syrienne s’apprête à affronter les rigueurs d’un nouvel hiver de guerre. Cette année, comme les précédentes, il est impératif de pouvoir accéder aux populations par les routes les plus directes et les moyens les plus rapides sur l’ensemble du territoire syrien. La survie de millions d’hommes, de femmes et d’enfants en dépend. Et s’agissant des points de passages, le point de passage de Yaroubiyah revêt une importance cruciale car il permet d’acheminer 40% des médicaments pour les opérations humanitaires dans le Nord-Est.

Madame la Présidente,

Certains n’hésitent pas à affirmer que l’aide humanitaire transfrontalière ne serait plus nécessaire, avec la reprise de certains territoires par le régime, en particulier au Sud-Ouest. Nous savons pourtant que l’accès humanitaire y est toujours largement entravé par Damas. A cet égard, nous en appelons une fois encore aux acteurs ayant de l’influence sur Damas pour garantir un accès humanitaire sûr, complet et sans entrave sur l’ensemble du territoire syrien, y compris dans les zones dont le régime a récemment repris le contrôle, conformément aux résolutions pertinentes du Conseil et au droit international humanitaire.

Madame la Présidente,

La France appelle les membres du conseil à faire preuve d’unité et de responsabilité pour préserver le mécanisme d’aide humanitaire transfrontalière qui est indispensable, à travers un renouvellement de la résolution 2165 pour une nouvelle durée de 12 mois.

Madame la Présidente,

Comme nous le répétons sans cesse, le respect du droit international humanitaire s’impose à tous. Il n’est pas négociable.

La protection des civils, dont les personnels humanitaires et médicaux, est une priorité absolue. Nous réitérons notre condamnation des attaques contre les civils et les infrastructures civiles, en particulier médicales, notamment celles qui sont intervenues dans le Nord-Ouest syrien. Le bureau d’enquête créé par le Secrétaire général sur ces attaques, auquel nous apportons notre plein soutien, doit permettre de faire toute la lumière sur ces incidents. Alors que plus de 70 000 personnes supplémentaires ont été déplacées au mois de novembre et que l’hiver s’installe, tout doit être fait pour rétablir le cessez-le-feu à Idlib.

Madame la Présidente,

La lutte contre le terrorisme est un enjeu crucial. Personne ne le conteste. Mais elle ne saurait être invoquée pour justifier les violations du droit international humanitaire. Ceux qui se rendent coupables de tels actes devront rendre des comptes devant la justice. Les preuves ne disparaitront pas, grâce au Mécanisme international, impartial et indépendant d’enquête sur les crimes commis en Syrie. Nous appelons à la coopération avec l’ensemble des mécanismes qui contribueront à la lutte contre l’impunité des crimes commis en Syrie.

Madame la Présidente,

Enfin, je souhaiterais réitérer qu’il n’y aura pas de terme durable à la tragédie humanitaire que vivent les syriens et les syriennes sans processus politique crédible.
Au-delà de la réponse humanitaire, seule une solution politique inclusive pourra mettre fin aux souffrances du peuple syrien. Et je voudrais à cet égard réitérer que tant qu’une solution politique crédible ne sera pas fermement engagée, la France, comme ses partenaires de l’Union européenne, ne participera pas au financement de la reconstruction.

La résolution 2254 demeure notre feuille de route et elle doit être mise en œuvre dans toutes ses composantes. Nous aurons l’occasion d’y revenir, et de nous pencher sur les avancées insuffisantes du processus de Genève en dépit des efforts de l’Envoyé spécial, demain, à l’occasion de notre réunion avec lui.

Je vous remercie.

Dernière modification : 25/02/2020

Haut de page