Soudan du Sud : la paix ne sera durable que si elle est inclusive [en]

Soudan du Sud
Intervention de Mme Anne Gueguen, représentante permanente adjointe de la France auprès des Nations unies
Conseil de sécurité – 17 décembre 2019

Madame la Présidente,

Je souhaiterais commencer par remercier Monsieur Shearer pour son exposé et surtout pour son engagement ainsi que celui de ses équipes sur le terrain. Je remercie également l’ambassadrice Wronecka pour son exposé et son action à la tête du Comité de sanctions.

Il est urgent que le gouvernement de transition soit formé. Le report annoncé le 7 novembre et qui court jusqu’au 20 février doit être le dernier. Il est en effet indispensable de rester sur le chemin tracé par l’accord de paix revitalisé. C’est la seule option dont nous disposons. La déclaration qui est intervenue ce matin doit être suivie d’effets.

La France demande au gouvernement sud-soudanais et à l’opposition d’utiliser les 65 prochains jours pour créer les conditions nécessaires à la formation d’un gouvernement d’unité nationale. Les tâches à remplir sont connues. Certaines peuvent être mises en œuvre immédiatement. Nous nous félicitons à cet égard que les 40 millions de dollars nécessaires à la mise en œuvre de l’accord aient été versés au comité national de pré-transition. Il convient à présent d’accélérer la mise en œuvre concrète de ces fonds tout en veillant à la traçabilité des dépenses engagées. Il revient également au gouvernement de délivrer un passeport à Riek Machar et, à l’IGAD, de clarifier son statut et de lui garantir une liberté de circulation.

La France encourage les parties à faire preuve de volonté politique et à ne pas laisser certains sujets retarder la formation du gouvernement d’union national. Nous le savons, la question des frontières intérieures est centrale dans le conflit. Cette question ne pourra peut-être pas être définitivement tranchée dans l’immédiat. Il est important, à court terme, que les parties fassent preuve d’un esprit de compromis et s’engagent au moins sur le nombre d’Etats et sur un mécanisme de négociation. Il est également important que les parties continuent à avancer dans la mise en œuvre des arrangements sécuritaires.

Les responsables du gouvernement et de l’opposition doivent aussi impérativement réaffirmer leur engagement à maintenir le cessez-le-feu. Le cessez-le-feu doit être la priorité absolue, tant la vie de millions de civils en dépend.

Madame la Présidente,

Nous le savons, la situation humanitaire reste dramatique. Elle a été aggravée par les inondations qui ont affecté plus de 900 000 personnes depuis le mois de novembre. Je rappelle que toutes les parties doivent garantir un accès humanitaire sûr et sans entrave à l’ensemble des personnes ayant besoin d’assistance humanitaire. Cela implique de protéger le personnel humanitaire et médical ainsi que les infrastructures civiles. Il est également indispensable de poursuivre la lutte contre les violences sexuelles et contre le recrutement d’enfants combattants. La mise en place du tribunal hybride prévu par l’accord permettrait de lutter contre l’impunité et contribuerait à réduire l’ampleur de ces violences. Et je souhaiterais poser à cet égard une question à Monsieur Shearer en lui demandant dans quels délais cette mise en place pourrait intervenir.

Par ailleurs, la paix ne sera durable que si elle est inclusive. La participation active et significative des femmes, et le respect des quotas prévus par l’accord, sont essentiels. Une paix inclusive nécessite aussi un espace politique ouvert. Or, les cas récents d’atteintes à la liberté d’expression et de violences contre des journalistes sont très préoccupants.

Les garants de l’accord de paix revitalisé et la région doivent poursuivre leurs efforts. Seule, en effet, une pression régionale concertée pourra inciter les parties à faire les concessions nécessaires. La France félicite à cet égard le Soudan pour son accession à la présidence de l’IGAD et encourage les autorités soudanaises à rester pleinement mobilisées sur cette question. Cet appel concerne aussi les autorités ougandaises, dont le rôle est crucial pour assurer le respect du nouveau calendrier pré-transitionnel. Il est important que le nouveau mécanisme de suivi annoncé par l’IGAD puisse être mis en place dans les meilleurs délai et que le groupe des cinq Etats Africains mandatés par l’Union africaine puissent soutenir pleinement les efforts de médiation de l’IGAD au Soudan du Sud.

Madame la Présidente,

Nous devons aussi réfléchir, en tant que Conseil de sécurité, au meilleur moyen pour les Nations unies d’appuyer les efforts régionaux. Les missions de bons offices et d’expertise technique fournies par la MINUSS sont utiles et doivent se poursuivre.

Enfin, pour conclure, ce Conseil a mis en place un régime de sanctions, qui nous permet de lister tout individu qui entraverait le bon déroulement du processus de paix. Il est important que notre Conseil utilise toute la palette des leviers et des moyens de pression à sa disposition, afin de s’assurer que le processus de paix ne dérape pas.

Je vous remercie.

Dernière modification : 25/02/2020

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